A trois mois de l’élection présidentielle, le premier ministre ivoirien et candidat du parti au pouvoir, Amadou Gon Coulibaly est mort mercredi à Abidjan des suites de problèmes cardiaques à l’âge de 61 ans.
«J’ai la profonde douleur de vous annoncer que le premier ministre Amadou Gon Coulibaly, chef du gouvernement, nous a quittés en ce début d’après-midi après avoir pris part au conseil des ministres», a déclaré Patrick Achi, le secrétaire général de la présidence, lisant un communiqué du président Alassane Ouattara.
Quel candidat à la présidentielle ?
Officiellement, le premier ministre était parti le 2 mai pour un «contrôle» en France, malgré la fermeture des frontières en raison de la pandémie de coronavirus. Il avait finalement dû se faire poser un stent, mais assuré être «de retour en forme». «La politique n’est pas au-dessus de la vie. Il y a une vie après la politique, par contre il n’y a pas de politique sans la vie», a réagi l’ancien premier ministre Charles Konan Banny (2005-2007), qui a été un des premiers à faire part de ses «profonds regrets». Assurant avoir été à l’origine de la première rencontre entre AGC et Alassane Ouattara en 1990, il a rappelé qu’à l’époque «c’était un jeune plein d’avenir qui était au fait des grands dossiers».
Quelques jours après avoir annoncé qu’il ne briguerait pas un troisième mandat, Alassane Ouattara, qui a évoqué la perte d’un «fils» et d’un «jeune frère», avait désigné en mars son «plus proche collaborateur depuis 30 ans» comme son successeur et candidat du parti au pouvoir à la présidentielle. Passé le choc du décès, la question va inévitablement se poser: qui va représenter le parti d’Alassane Ouattara à la présidentielle ? Le choix d’Amadou Gon Coulibaly par Alassane Ouattara avait fait grincer des dents, certains critiquant son autoritarisme ou son manque de charisme, d’autres évoquant déjà sa santé. Plusieurs cadres de la coalition de Ouattara, dont les anciens ministres Marcel Amon Tanoh ou Albert Mabri Toikeusse, avaient poussé leurs candidatures.
Sanctionnés au nom de la discipline interne, il ont été écartés des sphères du pouvoir et il paraît difficile de les rappeler. Un nom circule déjà à nouveau: celui du ministre de la Défense Hamed Bakayoko, dit «Hambak» qui avait accepté de ronger son frein. De source proche de la présidence, le président Ouattara y était franchement opposé il y a quelques mois. Mais avec le décès de Gon, dont Hambak assurait l’intérim à la primature pendant son absence en France, la donne a changé.
«Pas de plan B»
Comme le notait un observateur lors du retour d’Amadou Gon Coulibaly: «Il n’y avait pas de plan B, en cas de forfait de Gon. Ou plutôt la seule solution envisagée est une nouvelle candidature de Ouattara». Nul doute que ceux qui pressaient le président de briguer un troisième mandat vont relancer leur demande. Il pourrait s’il l’accepte retrouver de vieilles connaissances: le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), principale formation de l’opposition, sera représenté à l’élection présidentielle par l’ancien chef de l’État Henri Konan Bédié, 86 ans.
L’autre grande formation d’opposition, le Front populaire ivoirien (FPI), n’a pas encore fait connaître sa position. Son fondateur, l’ex-président Laurent Gbagbo, (au pouvoir de 2000 à 2010) est en liberté conditionnelle depuis son acquittement par la Cour pénale internationale, et son retour en Côte d’Ivoire est incertain. Mais aucun jeune n’a émergé pendant l’absence de Gbagbo et certains évoquent aussi sa candidature.
Ce serait en quelque sorte le remake de la présidentielle de 2010 qui avait débouché sur une violente crise post-électorale de plusieurs mois et 3.000 morts.